De paria à partenaire : Comment le président américain Trump a changé sa perception du Qatar
Autrefois accusé de financer le terrorisme, le Qatar est aujourd'hui célébré par Trump comme un allié clé des États-Unis, qui annonce des accords d'investissement colossaux.

La visite du Président américain Donald Trump au Moyen-Orient a été présentée comme une mission économique. Avant son départ pour l'Arabie saoudite, le Qatar et les Émirats arabes unis, les responsables de la Maison Blanche ont indiqué que l'accent serait mis sur l'attraction d'investissements à grande échelle aux États-Unis, et non sur la diplomatie traditionnelle.
Pourtant, à en juger par ses déclarations et ses actions pendant sa tournée, Trump semble déterminé à se présenter non seulement comme un « négociateur », mais aussi comme un « artisan de la paix ».
Mais est-il possible d'être les deux à la fois lorsqu'il s'agit du Qatar ?
D'un côté, le Qatar est un État du Golfe extrêmement riche, désireux de faire des affaires avec l'Occident et qui abrite la base aérienne d'Al Udeid, une présence militaire américaine cruciale dans la région. De l'autre, il est depuis longtemps critiqué pour son soutien à des éléments islamistes extrémistes.
Le Qatar a un passé avéré de financement des Frères musulmans et d'accueil des dirigeants de leur branche palestinienne, le Hamas. Selon la Foundation for Defense of Democracies, le Qatar entretient également des liens avec Al-Qaïda, les talibans, l'État islamique et le Corps des gardiens de la révolution islamique (CGRI) iranien, ce que le gouvernement qatari nie en partie.
Malgré ce bilan controversé, la Maison Blanche a annoncé mercredi que le président Trump avait finalisé des accords économiques d'une valeur de plus de 243,5 milliards de dollars avec l'émir du Qatar, Cheikh Tamim bin Hamad Al-Thani. La pièce maîtresse de cet accord comprend la plus grande vente jamais réalisée d'avions Boeing et de moteurs GE Aerospace à Qatar Airways, pour un montant total de 96 milliards de dollars.
« Cet accord historique permettra de soutenir 154 000 emplois américains par an, soit plus d'un million d'emplois tout au long des phases de production et de livraison », a déclaré la Maison Blanche dans un communiqué.
La fiche d'information affirme que le total des « échanges économiques » entre les États-Unis et le Qatar s'élève à au moins 1 200 milliards de dollars, bien que la manière dont ce chiffre a été calculé reste floue.
La portée de ces accords s'étendrait aux secteurs de l'énergie et de la technologie, ainsi qu'à un renforcement des relations en matière de défense.
« Hier, nous avons signé un accord pour l'achat par le Qatar de matériel militaire américain de pointe d'une valeur de 42 milliards de dollars, notamment des batteries de missiles THAAD, des avions ravitailleurs Pegasus, des Desert Vipers, des véhicules blindés légers, des véhicules de combat amphibies, des drones MQ-9B et Sky Guardian », a déclaré Trump dans un discours prononcé devant les troupes américaines à Al Udeid.
Le Trump de 2017 aurait-il approuvé un tel partenariat ?
À l'époque, le président américain avait eu des mots très durs à l'égard du gouvernement qatari.
« Malheureusement, le Qatar a toujours été un bailleur de fonds important du terrorisme », avait déclaré Trump.
Cette déclaration avait été faite peu après que l'Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, Bahreïn et l'Égypte aient rompu leurs relations diplomatiques avec le Qatar et fermé leur espace aérien aux vols qataris. Ces pays exigeaient que le Qatar ferme sa chaîne Al Jazeera, réduise ses relations avec l'Iran et rompe ses liens avec des groupes extrémistes tels que les Frères musulmans.
Cette crise régionale a finalement été résolue en 2021 grâce à un accord de réconciliation négocié par le Koweït, Oman et les États-Unis, bien que ces derniers aient initialement soutenu l'Arabie saoudite.
Sous l'ancien président américain Joe Biden, le Qatar est devenu un allié majeur des États-Unis hors OTAN et joue un rôle central dans la médiation des négociations de cessez-le-feu et de libération d'otages dans le cadre de la guerre en cours entre Israël et Gaza.
Mais quelle est la profondeur de cette alliance, et à quel prix ?
Une récente enquête de Free Press intitulée « How Qatar Bought America » (Comment le Qatar a acheté l'Amérique) a révélé que ce pays du Golfe a dépensé près de 100 milliards de dollars pour étendre son influence dans les institutions américaines, notamment au Congrès, dans les universités, les salles de rédaction, les groupes de réflexion et les entreprises.
Une offre de la famille royale du Qatar visant à faire don d'un jet de luxe de 400 millions de dollars au président Trump, qui pourrait servir de prochain Air Force One, suscite également de nombreuses interrogations.
Malgré les préoccupations en matière d'éthique et de sécurité nationale, le président a fait part de sa volonté d'accepter ce que ses détracteurs et ses partisans ont qualifié de « palais dans le ciel », de « cheval de Troie » et même de « pot-de-vin ».
Cet article a été initialement publié sur All Arab News et est republié avec autorisation.

Tal Heinrich is a senior correspondent for both ALL ISRAEL NEWS and ALL ARAB NEWS. She is currently based in New York City. Tal also provides reports and analysis for Israeli Hebrew media Channel 14 News.